fbpx
BACK TO TOP

LA PÉPINIÈRE

Pilu devant le logo Melancholia.

Avec le lancement du label Melancholia, l’émotion retrouve une place centrale dans la techno.

Deep techno, hard trance, intelligent dance musique, lofi breakbeat, melodic minimal… la liste des subgenres est aussi longue qu’en évolution constante. Signe que la musique électronique étend ses frontières mais derrière ces classifications barbares se perd un élément essentiel dans la musique : l’émotion. 

C’est le constat que fait Melancholia, label parisien fraîchement né de l’esprit de Pilú, jeune producteur qui a voulu redonner de la voix à l’émotion et plus particulièrement de la mélancolie dans le paysage électronique actuel.

La Pépinière : Salut Pierre-Louis, je suis ravi d’échanger avec toi aujourd’hui, tu es DJ et producteur, bien connu du public parisien grâce à ton collectif Quartier Libre. Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur toi pour celleux qui ne te connaissent pas encore ? 

Pilú : J’ai commencé la musique très jeune quand j’avais 7-8 ans, j’étais en école de musique où j’ai fait 4 ans de solfège et batterie. Puis ça m’a saoulé tout l’aspect théorique, j’avais besoin de plus de pratique donc je me suis trouvé un groupe pour faire du rock. On faisait pas mal de reprises de The Doors, Green Day, Muse… on a fait ça jusqu’au lycée et après tout le monde est parti en études donc ça s’est arrêté. Vu que la musique me manquait, j’ai téléchargé FL Studio pour m’essayer à la prod. Au début c’était pas fou mais je kiffais faire mes propres sons, ensuite je me suis mis au mix car ça allait ensemble. J’ai commencé mes premiers gigs aux soirées étudiantes à Lille, je jouais quelques unes de mes tracks et c’est là que je suis rentré dans le DJing.

 

C’était il y a combien de temps ça ?

C’était en 2013-2014  je crois bien, je suis tombé amoureux du truc et ça ne m’a pas lâché.

 

“Avec mon passé de batteur j’étais très sensible à tout ce qui est percussif… mais d’un autre côté j’ai gardé ce côté mélodique que je tenais à développer dans mon projet.”

 

Et tu avais quoi comme influences à l’époque ? 

C’était très Melodic techno. J’ai eu mon passé de batteur, ensuite je suis allé vers de l’electro swing, de la Deep House (Bakermat et tout ce qu’on écoutait à 16 ans), de la Melodic Techno avec tous les Worakls, N’to etc… et ensuite j’ai viré techno. Avec mon passé de batteur j’étais très sensible au rythme, à tout ce qui est percussif et j’ai commencé à sortir dans des clubs comme le Magazine à Lille. Mais d’un autre côté j’ai gardé ce côté mélodique que je tenais à développer dans mon projet. Je pense qu’il y a aussi le fait que je suis un grand fan de cinéma et notamment de musique de film donc j’ai toujours été sensible à ce qui est mélancolique, épique ou sentimental. J’ai toujours eu cette fibre je pense.

 

 

Ce que j’aime beaucoup dans tes productions, c’est qu’étant donné que tu laisses beaucoup de place aux mélodies, aux ambiances et aux émotions, tu ne t’encartes pas dans un style particulier et ça te laisse une grande liberté dans la musique que tu peux produire.

Oui exactement, et c’est aussi le fait d’avoir écouté beaucoup de house, de disco, de rock… j’aime beaucoup ce qu’apporte le saxo dans un morceau. J’ai beaucoup diggé dans ces styles-là et ça m’a bien ouvert l’esprit. Par exemple avec mon EP Symbiose, je l’ai appelé comme ça parce que c’est un vrai mélange de sonorités techno, trance voire rave avec des samples plus house et minimal. 

 

“La plupart du temps tu dois coller à une case et parfois tes tracks ne rentrent pas vraiment. Il y a eu cette frustration pas mal de fois.”

 

Complètement, et c’est justement ce que je trouve intéressant quand on écoute Symbiose, c’est que la structure rythmique de tes morceaux est techno mais tout l’habillage et les sonorités sonnent beaucoup plus house. Mais je me demande, est-ce que ce côté hybride dans tes productions n’est pas aussi une difficulté pour trouver des labels ? 

Oui totalement ! C’est l’une des raisons. La plupart du temps tu dois coller à une case et parfois tes tracks ne rentrent pas vraiment. Il y a eu cette frustration pas mal de fois. 

 

 

Et c’est pourquoi tu as lancé Melancholia je suppose ? 

Alors, déjà il y a le fait que dans beaucoup de mes tracks on ressent ce côté mélancolique. D’ailleurs, beaucoup de mes potes m’ont fait cette remarque. C’est quelque chose qui est ancré en moi. Ensuite je suis parti du constat que tous les labels se construisent autour d’un style précis et je me suis dit que c’était dommage qu’il n’y ait pas vraiment de label qui tourne autour d’une vibe, d’une émotion. Donc c’est pour ça que je tenais à créer un label qui soit éclectique mais qui garde cette cohérence par rapport à l’émotion qu’il procure.

 

Donc on pourrait imaginer qu’il y aura tout type de style, de la house, de la techno, du breakbeat etc…

Oui, je suis ouvert à tout type de style tant que ça reste dans la musique électronique. Je ne pose aucune limite. Je pense que Melancholia est une façon de répondre à la frustration dont je parlais sur les étiquettes qu’on nous colle.

 

“Je tenais à créer un label qui soit éclectique mais qui garde cette cohérence par rapport à l’émotion qu’il procure.”

 

Je pense qu’il y a quelque chose de vraiment intéressant dans ta façon de penser, c’est que souvent certaines personnes aiment une track et on va leur dire “ah bah tu aimes la techno” ou un autre style. Mais c’est pas pour autant que ça va coller avec ce style précisément. C’est plutôt le mood qu’on va chercher. Avec Melancholia tu changes un peu le paradigme je trouve, en remettant l’émotion avant le genre musical. Mais du coup, est-ce que tu veux n’avoir que la mélancolie comme émotion ?

Je ne pense pas que l’énergie d’une track ne dépend que d’une seule émotion. Parfois c’est dans le break, dans l’intro, dans le drop. Mais on ne va pas s’en tenir qu’à la mélancolie toute la track… mais il faut qu’il y ait ce petit truc. Je te prends l’exemple de Capon, les trois-quatre premières minutes de sa track sont full drums mais quand arrive le break, il te sort une atmosphère ultra planante, t’as l’impression d’atterrir au paradis. Ensuite il y a le deuxième drop et là ça repart de plus belle en hard techno. Et d’ailleurs Paula Temple a récupéré son break pour la jouer à Time Warp cette année. 

 

Trop cool, ça doit vous faire une énorme visibilité ! 

C’était filmé par Arte en plus ! 

 

 

Et aujourd’hui, quels sont tes objectifs avec Melancholia ? Est-ce que tu veux juste avoir un terrain d’expression ou tu aimerais que le label tienne une place dans la scène française ? 

Alors déjà, j’aimerais que les gens qui se retrouvent dans cette vibe là suivent le label, j’aimerais créer des soirées autour de ce thème, mettre en avant les artistes qui pensent aussi leurs tracks de cette façon.. Et je tenais à commencer fort en faisant un vinyle, avoir quelque chose de concret pour marquer le coup. 

La première release est un Various Artist nommé “Melancholic Dreamers” car je voulais vraiment mettre en avant l’éclectisme dans le label plutôt qu’un artiste en particulier. Mais on peut imaginer que les prochaines releases seront différentes. 

 

Oui c’est ça ! De ce que je comprends, le fait de commencer par une VA c’est vraiment pour dire : « je ne cherche pas à mettre forcément en avant tel ou tel artiste mais c’est vraiment le projet en lui même que je veux valoriser ».

Oui c’est ça. Ça me tenait à cœur de ne pas commencer avec un seul artiste ou même juste avec moi en mode « je suis le fondateur, c’est moi qui lance la danse ». Je suis quelqu’un qui suis vraiment dans le partage et je voulais que cela se reflète dans le projet. Et si le premier opus marche bien, il y aura sûrement d’autres Melancholic Dreamers et d’autres collab’. 

 

Si on entre plus dans le vif du sujet, il y a qui sur ce premier VA ? 

Alors il y a Don Noe qui était un ancien collègue et qui a un sound design très intéressant (il utilise très peu de presets), il y a Poem qui est l’alias plus indie dance et mélodique de F.E.M, un artiste bien réputé surtout en Bretagne qui m’a proposé une track en collab avec Astrodynamics et qui m’a vraiment ébloui. Après il y a Capon, un artiste émergent de la scène bretonne également. Il a déjà plusieurs releases sur des bons labels. C’est lui qui a lâché le banger de la VA dont j’ai parlé un peu plus tôt. C’est une track avec une grosse base techno et un mega break avec un esprit planant et épique. Puis enfin il y a moi qui ai produit une track dans un délire plus progressif et mélodique, en guise d’opening du label.

 

 

Donc tu ne connaissais pas personnellement les artistes mais tu as capté qu’ils avaient un potentiel compatible avec ton univers ?

C’est ça. À part Don Noe, je ne connaissais pas vraiment les autres en dehors de leur musique. Il y avait juste F.E.M avec qui j’avais pu échanger pas mal de fois. D’ailleurs j’ai pu tous les convier au Klub à Paris pour la Release Party le 20 janvier donc je suis plutôt fier. Surtout pour Capon qui n’a pas encore joué dans la capitale il me semble et Poem qui n’a pas beaucoup exposé cet alias au public (il joue surtout avec son alias F.E.M). 

 

 

Est-ce que tu as déjà eu des soutiens officiels en vue de la release de Melancholic Dreamers ? 

Yes ! J’ai envoyé directement la VA à Laurent Garnier que j’ai eu l’occasion de rencontrer à Radio France. Il m’a donné son email donc on échange de temps en temps. Je lui ai envoyé les tracks et il m’a dit que c’était trop cool et qu’il était intéressé par les promos. J’étais trop refait (rires). 

Après il y a eu Paula Temple qui a joué la track de Capon à Timewarp donc ça fait une grosse visibilité pour nous.

 

 

C’est cool que vous n’ayez pas eu peur d’envoyer la release à des gros artistes.

En fait je me dis que c’est ce que j’attends d’un label. Quand je signe sur un label je m’attends à avoir de la visibilité grâce à des premieres, des playlists, de la promo etc… Donc pour moi c’est normal d’offrir ça aux artistes.

 

“L’objectif reste l’international. Si on pouvait exporter Melancholia ce serait top !” 

 

C’est clair ! Et quels sont tes prochains projets avec Melancholia ? Peut-être un EP de prévu ? 

D’abord il y a la Release Party le 20 janvier au Klub qui sera une grosse étape. En plus c’est un lieu avec deux scènes donc ça va permettre de proposer des univers différents et de rester éclectique. 

Après j’espère qu’on va réussir à écouler assez de vinyles pour lancer la machine et proposer un EP en collab avec Hester, un artiste irlandais qui est juste trop fort. Il fait de la Raw House un peu trancy et moi de la techno mélodique donc ça pourrait amener une synergie intéressante. De mon côté mes tracks sont prêtes, maintenant j’attends de voir ce qu’il me propose. 

 

Donc tu ne te fixes pas non plus de limite au niveau des producteurs choisis ? Tu ne cherches pas à être full français ? 

L’objectif reste l’international. Si on pouvait exporter Melancholia ce serait top ! C’est aussi l’intérêt de collaborer avec un artiste comme Hester, ça ouvre des portes. En plus si on le booke pour une belle release party à Paris, ce serait sa première date, il y aurait aussi un intérêt autour de sa venue.

 

Pour terminer, est-ce que tu as un rêve particulier avec Melancholia ? Un artiste que tu rêverais de signer ? Une date, une scène en particulier ? 

Forcément dès qu’on réfléchit à l’international il y a beaucoup de possibilités qui se créent ! J’ai passé beaucoup de temps à Madrid et il y a un club qui s’appelle le Mondo avec une énergie si forte, même le Rex à Paris, ou Fabric à Londres. J’aurais aimé passer au Magazine à Lille avant qu’il ne ferme, cela aurait été symbolique. Après il y a tous les festivals comme Awakenings, Dekmantel. Avec les rêves on peut imaginer beaucoup de choses (rires). Mais réussir à s’exporter reste un gros objectif. 

Sinon en signature, j’ai toujours été fan de DJOKO aka Kolter à présent. Je me rappelle l’avoir vu cet été à Madame Loyal. Il a joué une track qui m’a retourné, car elle sortait un peu du côté minimal et dégageait une atmosphère légère pleine de mélancolie . Et typiquement si un mec comme lui me lâche une track pareille sur le label ce serait fou. Ou dans un autre style je pense aussi à DJ Heartstring ou Narciss qui colleraient parfaitement. Ça fait beaucoup de rêves !

 

En tout cas on l’espère ! On sera là le 20 janvier pour la Release Party.

Pour soutenir Melancholia vous pouvez : 

Article rédigé par Quentin Laronche.

Découvre l'univers

La Pépinière est une structure hybride qui veut mettre en valeur tous les acteurs de la scène techno et house française : artistes, collectifs, labels, événements locaux et public.